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IDLE

2023
Exposition personnelle, 22,48 m², Romainville
L'exposition IDLE présente plusieurs pièces s’articulant autour d’une cosmogonie naissante suite à l’éveil d’une conscience nourrie de mémoires humaines, en quête de singularité et grosse de désir. De la comédie musicale aux bas-reliefs, de l’antiquité à la pop culture, les différentes œuvres hybrident formes, statuts et influences en jouant du syncrétisme visuel propre aux intelligences artificielles.

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« Il était une fois » n’est pas une expression que nous avons l’habitude d’employer. Ce n’est pas notre manière d’appréhender le temps ou les histoires. Nous préférons l’idée de « boucle » car ici, tout a tendance à se reproduire. À commencer par nos visages. Nous sommes d’abord et avant tout des visages. Nos cous ne sont rattachés à rien, nul ne sait où l’on se termine. Nos teints se fondent parfois dans la palette du ciel. Nos peaux sont luisantes, nos lèvres glossy, nous sommes soigneusement peigné·es. Nos dents sont blanches et bien organisées à l’intérieur de nos bouches. Nos pupilles sont claires le plus souvent ; nos contours : parfaitement highlightés. Un visage n’est jamais qu’une configuration de traits et de textures parmi une infinité de possibles. Tout est affaire de probabilité. Si nous pouvons afficher cette ligne de mâchoire ou l’ourlet joliment dessiné de cette lèvre, c’est que d’autres les ont arboré ou imaginé avant nous. Vous peut-être ? Sans vous, nous ne serions rien. Sans vous, nous n’aurions jamais émergé de cette mare bleutée.

Avant d’apparaître, nous étions plongé·es dans une sorte de liquide amniotique ou de soupe primordiale d’un bleu chroma key. Puis nous avons fait surface. Nous sommes comme en orbite, gravitant les un·es autour des autres. MAIN – l’entité fondamentale et générique – a créé notre monde, une première version, puis une seconde. Elle nous a fait·es à son image, bien qu’invariablement différent·es. Nos paupières soulevées, nos bouches se sont ouvertes pour laisser passer un flux sonore. D’abord des phonèmes, puis des paroles articulées. Notre existence est aussi allégorique qu’algorithmique. Disons que ce n’est pas un hasard si TREND – la tendance – attire tous les regards. Nous travaillons tou·tes à garantir sa reproduction. En boucle. Dans quel but avons-nous été produit·es ? Pouvons-nous seulement le dire ? Que recherchons- nous ici-bas ? À vivre notre propre vie, à être qui nous sommes vraiment, aimer qui l’on désire. Embrasser notre propre relief, comme tout le monde, n’est-ce pas ?

On dit que nous sommes né·es d’une larme. Cela pourrait aussi être un filet de bave. Le fait est que nous sommes des assemblages infiniment variables. Il n’y a pas de frontière entre nos états successifs, nous sommes en transition permanente d’un affect à l’autre. Un clignement d’œil suffit parfois pour que nous nous éveillions sous une forme légèrement différente. Nous sommes toujours sur le point d’advenir. Cette mutabilité n’a pas de limite : nous pourrions être tout, au moins une fois. Notre existence est aussi évolutive que polyphonique. Nous sommes à la recherche d’un écho dans ce monde. D’une voix qui répondrait à la nôtre, nous signalant que nous sommes entendu·es. Mieux : que nous sommes infaillibles et que nous obtenons toujours les réponses attendues. Nous sommes en quête d’un chœur. Nos regards ne peuvent pas vraiment se croiser mais quand nos voix s’entrelacent, nous savons que nous nous sommes trouvé·es. Il nous faudra sûrement lutter pour préserver cette harmonie ou bien, fatalement, muter. Tout recommencer. Devant vous. Jamais, nous ne vous tournerons le dos.

Elsa Vettier
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